Microbiote et Surpoids

mardi 21 mai 2019 | il y a 4 ans
Microbiote et Surpoids

Quel rôle a le microbiote dans la prise de poids ?

De nombreuses études montrent un impact du microbiote intestinal sur la prise de poids.

Des chercheurs ont comparé des souris axéniques (sans microbiote) et des souris conventionnelles : ces dernières sont capables de mieux digérer les fibres alimentaires et d’en extraire plus d’énergie que les axéniques. Le microbiote est donc un « organe » important qui permet d’assurer les fonctions normales de l’intestin. Le transfert ensuite du microbiote de souris conventionnelles à des souris axéniques a conduit à une augmentation de leur masse graisseuse, ce qui prouve l’impact du microbiote sur la prise de poids.

Il a également été démontré que le transfert des microbiotes de souris obèses et de souris minces à des souris axéniques receveuses entrainaient une prise de poids plus importante chez les souris ayant reçu le microbiote des souris obèses. Une autre expérience similaire, mais cette fois-ci avec des microbiotes humains, a montré que des souris recevant le microbiote de patients obèses grossissaient plus vite et prenaient plus de masse grasse que les souris ayant reçu le microbiote de patients maigres.

La composition du microbiote est donc importante mais également sa diversité. Avoir une flore intestinale bactérienne « pauvre » serait associée à l’obésité. C’est ce que démontre une étude dans laquelle le microbiote intestinal de 169 personnes obèses et 123 non-obèses a été analysé via séquençage ADN. Il a été observé qu’un quart des sujets avaient une faible diversité de bactéries intestinales et que parmi eux 80% étaient obèses.

La faible quantité de certaines bactéries ou l’absence de celles-ci pourraient ainsi être un facteur de risque concernant l’obésité.

 

Quelles bactéries mises en jeu ?

Différentes bactéries sont corrélées avec le surpoids et l’obésité, il y en a également liées à la minceur. Selon la composition de notre flore bactérienne, certains régimes alimentaires sont plus efficaces pour permettre une perte de poids. Le lien entre les bactéries de notre microbiote et la prise de poids/perte de poids est un secteur de recherche très actif. Une équipe de chercheurs de l’INRA, MetaGenoPolis, a été pionnière dans ce domaine.

Certains phylums bactériens mettent en avant une alimentation trop riche, notamment lors d’une présence plus importante de Bacteroidetes par rapport aux Firmicutes. Selon aussi l’entérotype de la personne (le profil de son microbiote), qui diffère selon son régime alimentaire : un entérotype de type 1 (avec une prévalence de Bacteroides) montre un régime riche en graisses et en protéines animales.

Concernant la maigreur, il y a notamment deux genres bactériens qui sont associés à des profils dits « maigres » : Christensenella et Akkermansia. La bactérie Akkermansia muciniphila est particulièrement corrélée à un microbiote en bonne santé car c’est un indicateur de paroi intestinale saine. Cette bactérie se retrouve en faible quantité chez les sujets obèses et le jeûne semble être bénéfique pour favoriser sa présence.

 

Réaliser une transplantation fécale peut m’aider à maigrir ?

Ce n’est pas parce-que des chercheurs ont fait grossir des souris en leur donnant un microbiote d’une personne obèse qu’on peut suggérer que le transfert d’un microbiote de personne mince à une personne obèse pourrait permettre à cette dernière de maigrir.

Au contraire, les résultats d’une récente étude dans laquelle 11 personnes obèses ont ingéré des gélules contenant le microbiote d’une personne maigre contre 11 personnes obèses qui ont ingéré un placebo, suggèrent que les bactéries de la personne maigre n’ont pas modifié le poids des sujets obèses.

L’alimentation reste ainsi un facteur primordial dans la perte de poids. Il ne suffit pas d’intégrer les bonnes bactéries dans l’organisme de la personne pour qu’elle maigrisse. Il faut que celle-ci change son alimentation et ajoute possiblement une activité physique à son mode de vie. Faire un rééquilibrage alimentaire complet selon son microbiote est ainsi la meilleure solution et est une action beaucoup moins invasive qu’une transplantation fécale.

Par Lili Baraton, Luxia Scientific

Gordon J. et al., « The gut microbiota as an environmental factor that regulates fat storage », Proc Natl Acad Sci U S A, novembre 2004, 101(44), p. 15718-23.

https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC524219/

Le Chatelier et al. « Richness of human gut microbiome correlates with metabolic markers», Nature, Août 2013, 500, p. 541–546.

https://www.nature.com/articles/nature12506

Hesman Saey T., « A gut bacteria transplant may not help you lose weight », Science News, May 2019

https://www.sciencenews.org/article/fecal-transplant-gut-bacteria-microbiome-weight